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par Bruno Blum
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Bob
MARLEY (Robert Nesta Marley)
Né à Nine Mile, Saint Ann, Jamaïque,
le 6 février 1945, décédé à Miami,
Floride, États-Unis, le 11 mai 1981
Chanteur et guitariste de cantiques, de soul, de ska, de rock steady
et de reggae, réalisateur artistique, actif de 1959 à
sa mort.
Bob Marley est la première (et la dernière ?) véritable
superstar venue d'un pays pauvre.
Sa musique, le reggae jamaïcain, un proche dérivé
du rhythm & blues et de la soul américaine, est la voix de
tous les peuples opprimés de la terre, au nom desquels il s'exprime.
Brillant et prolifique chanteur auteur-compositeur, sa carrière
internationale ne dure que huit années intenses.
Outre ses merveilleuses créations, sa dimension sociale et spirituelle
lui donnent vite l'aura d'un exemple et, pour beaucoup, d'un prophète.
Il succombe à un cancer (mélanome) en pleine gloire à
trente-six ans, mais son mythe lui survit et s'amplifie depuis hors
de toutes proportions.
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Nesta
Robert Marley est né et élevé dans un hameau des
collines à une heure de route de la côte nord de la Jamaïque.
Sa mère Cedella Malcolm, dont le père est un paysan chrétien
et rebouteux, cède un temps aux avances du capitaine Norval Marley,
qui a plus de cinquante ans et supervise à cheval des travaux
dans la campagne.
Puis pour suivre les préceptes de l'église, Cedella exige
le mariage et se refuse à lui. Après des semaines, elle
finit par céder et à la naissance de l'enfant, elle n'a
que dix-sept ans.
Le capitaine accepte le mariage contre l'avis de sa famille de planteurs
jamaïcains d'origine britannique, qui le déshérite
: un Blanc n'épouse pas une Noire.
Norval prénomme son fils Nestor, avec en deuxième prénom
Robert, du nom de son frère. Il disparaît bientôt
et sombre dans la boisson pour ne réapparaître cinq ans
après. Rongé par la culpabilité, il promet alors
une éducation décente pour son fils, qui le rejoint à
la capitale en bus.
Mais le petit Nesta (sa mère écrit ainsi le prénom),
qui lit l'avenir dans la paume des mains au village, ne connaîtra
jamais son père. Il ne sera retrouvé que par miracle un
an et demi après chez une vieille dame qui l'élève
dans un quartier très pauvre. Cedella revoit alors une seule
fois le père, un homme faible mais gentil. Coupable, il est en
pleurs, et donne tout ce qu'il a pour son fils : deux pièces
en cuivre d'un penny. Il décèdera quelques années
plus tard, alcoolique, brisé et malade.
En
rentrant à la maison, traumatisé, Nesta refuse de dire
l'avenir et déclare que désormais, il sera chanteur. Il
va à l'école et participe aux travaux d'agriculture. Son
grand-père Omeriah, qui l'a élevé, jouait du violon
et de l'accordéon. Son oncle, musicien semi professionnel, jouait
de la guitare et du banjo dans les groupes de bal populaire (branle
écossais, polka et valse) le quadrille, équivalent du
bluegrass américain en Jamaïque.
Le traditionnel mento Touch Me Tomato est le premier morceau que chante
Nesta à l'âge de cinq ans en frappant deux bouts de bois
pour tenir le rythme. En 1957 après avoir tenu une petite échoppe
de vendeuse de fruits en bord de route sa mère emménage
à Kingston et devient femme de ménage.
Bientôt elle s'installe dans le ghetto urbain très dur,
pauvre et violent de Trench Town où elle vit avec le père
de Neville "Bunny" Livingston. Bunny devient le partenaire
de chant de Nesta.
Ils
s'essayent sur des cantiques et des chants d'église. C'est Bunny,
toujours entreprenant, qui fabrique une première guitare avec
des fils électriques sans gaine. Une boîte de sardines
sert de caisse de résonnance, et un morceau de bambou de manche.
Leurs voix d'adolescents élaborent alors les premières
mélodies des futurs Wailers.
En 1959, Bob gagne une livre sterling à un concours de chant
public au Queens Theatre. Beverley's En 1962, alors qu'il est en apprentissage
pour devenir soudeur, il se blesse dans un accident de travail et échappe
de peu à la perte d'un il. Derrick Morgan, soudeur dans
son atelier, vient de subir la même mésaventure. Il a profité
de son bref congé de convalescence pour tenter sa chance auprès
d'un producteur et a enregistré son premier disque. Il conseille
à Nesta d'en faire autant.
Le ska qui vient de naître est le symbole de l'indépendance
jamaïcaine obtenue en 1962 et le jeune Marley se consacre alors
à la musique. Comme Derrick Morgan il va chez les disques Beverley's
et enregistre trois titres pour Leslie Kong.
Il y rencontre l'adolescent Jimmy Cliff, avec qui il joue quelque peu.
Deux 45 tours de ska sortent chez Beverley's, l'un sous le nom de Robert
Marley, Judge Not puis One Cup of Coffee, une reprise d'un succès
country de Claude Gray qui sort sous le nom de Bobby Martell imposé
par Kong.
Terror, qui parle du terrorisme meurtrier régnant dans les ghettos,
ne sortira pas.
Mais déjà avec ces trois titres, les trois thèmes
qui reviendront dans son uvre sont là : spiritualité,
amour et lutte sociale. Il a dix-sept ans et les deux 45 tours sortent
aussi en Angleterre sur une jeune marque spécialisée en
ska, Island, qui appartient au Jamaïcain blanc Chris Blackwell.
Studio One Nesta et Bunny sont alors déjà rejoints par
Winston Hubert "Peter Tosh" Mc Intosh, qui possède
une vraie guitare et leur apprend à jouer.
Avec
Nesta Robert "Bob" Marley, ils forment un trio d'harmonies
vocales modelé sur un groupe soul, les Impressions de Curtis
Mayfield, qu'ils copient.
Bunny chante les aiguës, Peter les graves, et Bob est au milieu.
Joe Higgs, qui a déjà publié plusieurs disques
vit lui aussi à Trench Town, et leur enseigne le chant et les
harmonies. Ils sont bientôt cinq avec l'addition de Beverley Kelso
et Cherry Green (elle quitteront les Wailers en 1965), et Junior Braithwaite
qui devient le chanteur solo, jusqu'à son départ en 1964.
Junior n'est chanteur principal que sur Habits, Straight and Narrow
Way, Don't Ever Leave Me et It Hurts To Be Alone.
Ils chantent essentiellement des cantiques, des reprises de doo-wop
et de soul américaine. Après une audition chez Studio
One, "Coxsone" Dodd leur demande de composer des chansons.
Ils travaillent beaucoup et leur énergique premier simple ska,
Simmer Down, chanté par Bob en 1963, est aussitôt un premier
gros succès en Jamaïque.
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Lively
Up Yourself
Lively up yourself
and don't be no drag
Lively up yourself, 'cause this is the other bag
Hey, lively up yourself and don't be no drag
You lively up yourself, dig it, the other bag
Hey, you rock so, you rock so, like you never did before
You dip so, you dip so, and you can dip thru my door
You come so, you come so, oh yeah, like I do adore you
You skank so, you skank so, and-a I can assure you
You can lively up yourself and don't be no drag
Hey, you lively up yourself, can you dig it?
Hey (you rock so,
you rock so), like you never did before
You dip so, you dip so, can you dig it?
You lively up yourself and don't be no drag
You lively up yourself, 'cause this is the other bag
Hey, lively up yourself
Lively up yourself, other bag
Can you dig it? Can you dig it? ...
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Mais
malgré de nombreux succès et un premier album, la compilation
The Wailin' Wailers (Studio One), très déçus ils
ne touchent jamais plus de trois livres sterling par semaine. L'album
contient déjà une première version de Put It On,
Simmer Down, et les délicieuses ballades très soul I'm
Still Waiting et I Need You. Accompagnés par les fantastiques
Skatalites, ils enregistrent entre 1963 et 1966 une centaine de morceaux
splendides dont les créations de Marley Cry To Me, One Love,
Love And Affection, mais aussi le And I Love Her des Beatles, et des
adaptations du Like a Rolling Stone de Bob Dylan sous le nom de Rolling
Stone, du Do You Love Me des Contours sous le nom de Playboy, du I'll
Keep On Moving de Curtis Mayfield sous le nom de Rude Boy (repris sous
le nom de Walk The Proud Land par la suite), plusieurs autres reprises
de soul et beaucoup de ska, une nouvelle musique devenue le symbole
de la récente indépendance de l'île.
Ces titres sont disponibles sur le double CD posthume One Love (1991),
et Climb The Ladder (2000) (Heartbeat/Média 7).
Le 10 février 1966 Nesta se marie avec Alpharita Consticia "Rita"
Anderson, du trio des Soulettes chez Studio One.
Rita Marley, qui a adopté Sharon Pendergast Marley, née
le 23 novenbre 1965 et fille de sa cousine, est chanteuse de ska comme
lui. Rita est enceinte, ils ont besoin d'argent et Nesta quitte l'île
rejoindre sa mère, qui s'est remariée à Wilmington,
Delaware, aux Etats-Unis, avec un Mr Booker. Le fonctionnaire qui lui
délivre son passeport n'aime pas son premier prénom Nesta
et inscrit le deuxième, Robert, plus sérieux, en tête.
Le diminutif de Robert, Bob, devient le surnom de Marley.
Pendant
son absence, Bob est remplacé temporairement par Constantine
"Dream" Walker, un des trois membres des Soulettes. Wail'n
Soul'm Du 21 au 23 avril, l'empereur d'Ethiopie Haïlé Sélassié,
le Dieu vivant, Jah Rastafari, des rastafariens jamaïcains fait
une visite officielle qui marque fortement la Jamaïque et précipite
le développement de ce mouvement dans l'île.
Bob Marley travaille alors dans l'équipe de nettoyage de l'hôtel
Dupont à Wilmington aux Etats-Unis.
Il rentre à l'automne 1966, se déclare rasta et avec ses
économies monte sa marque de disques, Wail'n'Soul'm (série
The Complete Bob Marley & theWailers 1967-1972 et coffret Songs
Of Freedom, Island).
Le nom Wail'n'Soul'm est un abrégé de Wailers and Soulettes
music. Avec d'excellents musiciens comme Winston Wright au piano et
à l'orgue, Hux Brown, Lynn Taitt, et Ranford "Rannie Bop"
Williams à la guitare, Jackie "Sledge" Jackson à
la basse, Hugh Malcolm à la batterie, Alvin "Seeco"
Patterson, Constantine "Dream" Walker aux percussions (et
les cuivres des Skatalites), tous les ingrédients du succès
sont déjà là (album Selassie Is The Chapel, JAD/Pense
à Moi/EMI).
Les disques sortiront désormais le plus souvent sous le nom de
Bob Marley & the Wailers, et le cas échéant Peter
Tosh & the Wailers. Ils ouvrent aussi une minuscule boutique et
y vendent leurs 45 tours de rock steady, le nouveau style, plus lent
que le ska. Bob les distribue lui-même en vélo, mais aucun
n'a de succès.
Avec Bend Down Low et Stir It Up (réenregistrés plus tard
lors de sa carrière internationale, comme beaucoup de ses meilleures
compositions), il chante des paroles salaces à double sens. Freedom
Time, également à double sens, fête à la
fois leur départ de chez Studio One et la fin de l'esclavage.
D'autres réussites s'appellent I'm Hurting Inside, Mellow Mood
(très repris par d'autres). Leur première fille Cedella
naît le 23 août 1967.
Quand
Bob Marley annonce sa prise de conscience rasta à sa mère
Cedella, très chrétienne, elle est choquée, comme
le serait tout Jamaïcain, qui considèrent à priori
les rastas comme blasphématoires. Mais elle le suivra plus tard
dans cette voie. JAD Peter Tosh chante de plus en plus de morceaux avec
Bunny et Bob aux harmonies. En janvier 1968, Bob Rita et Peter Tosh
rencontrent le chanteur américain vedette de télévision
Johnny Nash et son imprésario Danny Sims. Les Wailers
commencent à enregistrer pour lui des maquettes de chansons.
Sims leur fera bientôt signer un contrat exclusif d'agent, d'éditions
musicales et de production de disques. De juillet 67 à septembre
1968 Bunny Livingston est en prison pour détention de chanvre,
et Rita Marley le remplace au sein du trio.
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Alors
que Johnny Nash enregistre en Jamaïque une série de succès
rock steady, les Wailers profitent de sa présence et de ses musiciens
et enregistrent pour Sims -sous le nom de Bob Peter et Rita- quatorze
morceaux très soul/rock steady comme Love (Peter Tosh & Rita),
Rock To The Rock et How Many Times avec des musiciens américains
des studios Atlantic (qui travaillent notamment avec Aretha Franklin)
et Hugh Masekela à la trompette.
On y trouve leurs tout premiers véritables reggaes, avec les
versions originales de Soul Rebel, de Hammer mais à l'époque
seules de nouvelles versions de Bend Down Low et Mellow Mood
sortent sur un 45 tours JAD (distribué en France par CBS). Ils
seront publiés en partie plus tard chez CBS (CD Chances Are),
soit défigurés par des instruments ajoutés soit
mal remixés, soit intacts sur différents albums (Jamaican
Storm, etc) bon marché passés inaperçus dans les
années 80.
Ces séances splendides ne sortiront étonnamment qu'en
1997 sur le CD Rock To the Rock (série The Complete Bob
Marley & theWailers 1967 to 1972).
Simultanément, leur propre marque Wail'n'Soul'm publie le slow
Chances Are, Rocking Steady, et Hypocrites qui
deviendra, des années plus tard, très populaire dans l'île
à la suite d'une réédition, ainsi qu'une adaptation
de Crying in the Chapel (succès doo-wop très lent
de Sonny Til & the Orioles en 1953, repris en 1965 par Elvis Presley)
qui devient le superbe Selassie Is the Chapel (voir album du
même nom) sous la plume de Mortimer Planno, un guide spirituel
rastafarien devenu une sorte d'imprésario, et qui signe ici les
paroles du premier manifeste rasta de Bob Marley.
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Apparaît
aussi le très beau Don't Rock My Boat, qui deviendra un
succès mondial sous le nom de Satisfy my Soul en 1978 (à
ne pas confondre avec Satisfy my Soul Jah Jah -voir album du même
nom- et Satisfy My Soul Babe (1971), très différents).
Plusieurs petits producteurs comme Bunny Lee (Mr. Chatter Box)
ou le Hollandais Ted Pouder (Adam and Eve) tentent leur chance,
Wailers compris, mais malgré leur qualité aucune des reprises
cherchant manifestement le succès ne rapporte un sou, ni The
Letter des Box Tops, ni la reprise du générique télé
américain des Archies Sugar Sugar ni Black Progress,
une adaptation du manifeste de négritude (Say It Loud) I'm Black
and I'm Proud de James Brown (série The Complete Bob Marley
& the Wailers 1967 to 1972).........(suite
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