C'est
de BRUXELLESen
Belgique que nous vient UMAN
. Depuis quelques temps, on le retrouve partout, sur les
mixtapes, les compilations, les sounds ... A force de
travail, il est devenu un personnage incontournable de
la scène reggae dancehall francophone, en pleine
ascension. Après ses premières armes, faites
sur la scène Hip Hop bruxelloise, c'est dans le
dancehall qu'il a posé son dévolu et qu'on
lui a donné sa chance, il n'est pas prêt
de la lâcher ... En exclusivité découvrez
l'interview du top DJ UMAN.
Uman,
d'où viens-tu ?
Je viens du Dancehall bruxellois ! Enfin, à
la base je viens du Hip hop bruxellois.
J'ai commencé dans le Hip hop y a une quinzaine
d'années. En même temps, petit à
petit on a lancé une émission radio
de Dancehall ; il y avait aussi une boutique de
reggae où on traînait tout le temps
; du coup on a commencé à push up
le DanceHall, on a monté un sound autour
de cette émission qui s'appelle Bass
Culture, ce qui fait que finalement j'ai
eu plus de scènes où je pouvais faire
du ragga full time que de scènes où
je pouvais faire du Hip hop, donc j'ai vraiment
développé mon style dans le ragga.
Plus
tard, j'ai eu une opportunité en or. Un pote
m'a branché pour aller signer sur une major,
en l'occurrence BMG,
pour sortir un 5 titres. De là, le disque
est arrivé à Paris et ça m'a
donné un coup de pied au cul.
Dans la lancée je suis venu poser mes 45t
à Paris ; comme avec le sound on avait déjà
pas mal linké d'artistes français
qui étaient venus vers chez nous, je me suis
retrouvé sur des prods de Mek
It Happen, puis sur les prods Bakchich
; j'ai aussi traîné avec Frenchie,
je suis passé deux fois à
B.O.S.S, bref les plans se sont enchaînés
depuis.
Dans la course ça s'est terminé avec
BMG, les gars qui m'avaient fait confiance n'étaient
plus à leurs places. Ca n'a rien à
voir avec le fait qu'ils m'aient fait confiance,
c'était des gens ouverts d'esprit et c'est
pas exactement ça que l'industrie recherche.
De là j'ai pas eu envie de dormir, je me
suis dit que j'allais résumer un peu ce que
j'avais fait pendant ces deux, trois ans d'exposition
où on m'a vu. J'ai donc sorti une mixtape,
qui s'appelle Umanizm,
A la guerre comme à la guerre qui
est un peu le résumé de ma situation.
C'est moi qui me débrouille pour arriver
à me faire connaître. Je vais à
la rencontre des gens, et j'ai un bon support avec
le sound system. En plus, ça me permet de
cutter dans l'underground ! En vérité
c'est une bonne vibe parce que tu voyages, tu rencontres
des gens, y a un vrai kiff là derrière,
c'est trop fort de rencontrer des gens, d'aller
à leur rencontre. C'est ça qu'il faut
faire, aller partout, il faut linker, il faut créer
des chaînes plus fortes que les autres chaînes
.
Tes
links .
Bruxelles est très cosmopolite. Par contre,
en France, la scène est très franco
française, du fait que la France est un
grand pays et que les gars sont plus centrés
autour de ce qu'il se passe ici, car il se passe
énormément de choses, surtout en
matière de sounds. Chez nous, c'est différent
! On est un petit pays, il se passe pas beaucoup
à l'intérieur du pays, et on fini
par avoir beaucoup de links à l'extérieur.
Quand on ramène des gens de partout, ces
gens nous amènent ailleurs et on rencontre
d'autres gens qu'on refait revenir en combinant
la radio, les
émissions,
Internet, les productions Uman ... tout ça.
On commence à avoir un carnet d'adresses
très bien rempli avec de bons noms dans
tous les pays.
Tes
collaborations avec des artistes français
?
Comme je le disais la scène française
est super bien développée, et du
fait qu'on ait ramené pas mal des gens
à Bruxelles via cette scène là
et que par ailleurs j'ai été traîner
mes guêtres à Paris quelques fois,
y a pas mal de gens que j'ai rencontré
qui sont actifs dans l'ombre, genre des producteurs,
des promoteurs, des sounds, des gars qui pushent,
des gars comme Sergio d'Heartical
ou bien comme Lionel et
Olivier de Mek It Happen, Fany,
Blue Moon, Patator
(Patates Records NDR), monsieur Patate Ca
m'a ouvert plein de connections qui m'ont permis
de bosser et d'un autre côté on a
enregistré pas mal de dub plates avec tous
les artistes. En fait, les links se sont fait
naturellement, parce qu'il y a du travail derrière
et le travail amène des links naturels,
c'est ça qui est cool !
Pour moi la scène a plus de enfin
pas plus d'intérêts, parce que la
scène Belge, c'est notre scène,
on l'a construite et on est à la maison,
mais c'est un peu explorateur quand tu viens en
France pour moi, c'est un grave kiff, et puis
il y a beaucoup
d'activité,
même les gars des Antilles ils descendent là,
parce que ça se passe beaucoup à Paris,
il y a beaucoup de Djs qui sont à Paris et qui
sont venus là parce qu'il y a du travail à
faire. Il n'y a pas de secret, quand tu es Dj, ton envie
c'est "do de work", tu veux travailler, tu veux
avancer, tu veux être "good work".
La
scène belge ...
La scène belge est assez étonnante, parce que c'est
une scène qui est divisée en deux : francophone et
néerlandophone.
Les sounds néerlandophones sont blindés de gros dub
plates yardies, c'est des sounds un peu à l'allemande, genre
Pow Pow, et du côté francophone c'est plus des
sounds à la française avec animations en français
et aussi en anglais, et pas mal de dubplates français. Dans
les sounds néerlandophones tu retrouves franchement la vibe
internationale yardie.
Nous on est un sound Belge, on a joué en France mais je pense
qu'on est le sound le plus actif, on a joué aussi en Allemagne,
on a joué en Hollande, on va jouer en Suisse, on joue un
peu partout ; mais bon, il y a de l'ancienneté, un
shop,
un site internet http://www.bassculturesound.com
, beaucoup de trucs qui font les connections.
Un sound comme Farwest sound c'est sûr qu'il
joue plus en Hollande ou en Allemagne ou en Belgique, alors
que c'est un big sound, vraiment big, official avec vraiment
des dangereux plates, mais ils jouent plus en Flandre, en
Hollande et en Allemagne qu'en France.
Les
artistes que tu kiffes ?
Je kiffe bien Mad Killa, j'aime
beaucoup la vibe de Azrock, j'aime
bien la vibe de Yaniss, la vibe
de Mory, la connection Féfé
Tiwony. T'as vu ce qu'on entend en ce moment, y a du
bon ! Même sur le "savage", le tune
des Neg' Marrons je le trouve
bad ; Kossity je trouve qu'il
a vraiment un pur style dancehall qui déchire et dans
les gens qui montent derrière tu entends encore plein
de trucs. Je connais moins bien la scène antillaise,
enfin vraiment antillaise, en tout cas tous les gars que je
vois et que je check ils ont un niveau incroyable, tu vois
ce que je veux dire ? Genre là hier j'étais
à la radio avec Benja
(DJ de Montpellier), tu vois déjà qu'il y a
un haut niveau, tu vois que c'est natural, c'est bad !
Et puis sur la scène internationale, ils sont tellement
nombreux les artistes, mais Denis Brown,
Capleton, Marley.
J'aime bien un groupe qui s'appelle Cultural
Roots, j'aime bien les Ras Ites,
j'aime bien Sizlzla, j'aime bien
Elephant Man, j'aime bien vibes
Cartel, j'aime bien pleins de trucs.
En gros, les bigs artistes dancehall du moment, avec une nette
préférence pour Bounty,
pour le personnage, parce que vraiment je trouve que c'est
un tueur, Beenie Man c'est le
maître des flows, après Elephant
man, energy God, ça dis tout, et lui il a bien
bousillé le style, les Ward 21
c'est incroyable, et puis je suis K.O ! J'adore Jah
Cure, Beres Hammond, je
kiffe Glen Washington, j'aime
les Mighty Diamonds, j'aime
Aswad ... Le reggae c'est vraiment large !
Dans
tes lyrics, quand tu parles de ceux qui se mettent un turban
sur la
tête pour faire comme le fayah man etc...
Ca s'adresse à personne en particulier. Je pense que
l'identité c'est un truc qui est interne à chacun,
que l'identité c'est un travail sur soi-même,
et que ça peut pas t'arriver en VPC, tu vois ce que
je veux dire ? Il n'y a pas de manuel, je pense que c'est
super important de défendre son identité et
d'en créer une qui est propre. Ca veux pas dire que
moi je remet en cause le travail des bobos par exemple, je
crois que les Bobos savent ce qu'ils font, je pense qu'ils
ont un travail à accomplir, ils ont une mission, ils
accomplissent leurs missions dans leurs conditions, dans leurs
réalités et je pense que c'est une question
de réalité. On a pas tous
la même réalité, donc parfois faire comme
si tu étais dans celle des autres c'est pas toujours
évident, ça n'a pas toujours du sens !
Donc,
moi ce qui m'intéresse chez les gens, c'est quand je
les check, que je sens qu'ils sont réels ; mon truc il
est là, tout se joue là dedans, dans le réalité.
Donc quand je dis "ils veulent les lunettes de Puff, ou
ils veulent les skates de Jordan ou ils veulent porter le turban
pour faire comme le fayah man, ça veux dire que Puff,
Jordan ou le Fayah man ce sont des gens qui ont travaillé
pour être ce qu'ils sont et c'est pas des gens qui ont
mis un turban sur leurs têtes et qui sont devenus Fayah
man, ni des gens qui ont mis des lunettes pur devenir Puff Daddy,
ni un gars qui a mis une paire de Baskets et qui a appris à
voler plus haut que tout le monde. Ce sont tous des gars qui
ont bossé dur et qui ont créé leur truc
tu vois, et je pense
que
dans cette société il y a beaucoup de paraître
et peu d'être. Il faut pas croire la propagande, les gens
ils sont toujours là à faire leur propre propagande,
ils se donnent des airs, ils ont l'air de ! Mais moi je crois
que ce que je check, si je vois que c'est réél,
c'est réél.
C'est
pas un truc qu'on rencontre beaucoup dans le Dancehall, justement..
Mais, c'était pas ça reggae music au départ
!
D'abord la réalité yardie et la réalité
européenne ne sont pas les mêmes. Quand tu es né
à Yard, tu es un descendant d'africain, un descendant
d'esclave qui a été transposé dans les
Caraïbes, tu es déjà un sufferer qui vit
dans des conditions ruffs. Tu viens du ghetto, et le ghetto
c'est pas l'endroit où l'éducation circule le
plus, l'éducation c'est la clé de l'esprit critique
et l'esprit critique c'est la clé de la liberté.
Les gars se battent avec leurs armes ! Quand toi on t'as donné
plus d'armes, tu dois utiliser les armes qu'on t'as donné
au jour le jour pour avancer, tu dois pas régresser,
tu dois positiver, et utiliser la puissance qu'on te donne peut
être aussi pour t'asservir mais tu peux les retourner,
il faut retourner le feu contre le dragon.
Moi,
je sais d'où je viens, je connais mon éducation,
je connais la réalité de mes rues, je connais
la mentalité des gens autour de moi et je m'identifie
à ce qui me ressemble. Dans ce qui me ressemble, il
y a cette musique, mais cette musique, comme le Hip Hop tout
ça c'est la culture urbaine, c'est des sons de rebelles
qui circulent en milieux urbains depuis longtemps. Que ce
soit Bob Marley ou que ce soit le vieux Funk ou le Hip Hop,
c'est une culture commune à tous les jeunes de la rue,
ce sont des trucs d'autoradios et de soirées privées,
pas des trucs de boites. Maintenant il y a moyen de le faire
en boite ! De toutes façons, on est dans une société
de vanité, donc dès qu'il y a un peu de pognon,
on en dépense toujours une partie au paraître,
voir même la plus grande partie! Peu sont ceux qui l'utilisent
pour creuser les fondations, alors que les yardies combien
il y en a qui sont au top de leur propre label ? Tout
le monde dit " paraître, paraître" mais
les gens ici, ils sont prêts à faire le paraître
en oubliant de faire le travail, le travail du paysan, le
travail de l'ouvrier ou le travail de l'artisan, la vie c'est
pas un cadeau que tu dois déballer, c'est un cadeau
que tu construis.
La vie, c'est le sens inverse du cadeau ! Le cadeau tu le
déballes et tu vas chercher ce qu'il y a à l'intérieur,
alors que la vie tu construis petit à petit à
l'intérieur, tu mets une boîte autour et après
tu mets un emballage, c'est ça la vie, c'est dans ce
sens là.