Contrairement
à ce que certains pourraient penser, ce n'est pas une
interview de l'acteur américain que nous vous proposons
ici, mais bien celle du DJ Jamaïcain JOHN WAYNE,
un des DJs phares de l'époque Digital.
Si John Wayne est célèbre grâce à
quelques titres dont son super hit "Call
the Police", il n'est pas réellement
reconnu à la hauteur de ce qu'il devrait être.
En effet, il est également le compositeur de certains
standards, qu'il écrivait à une époque
où il ne pouvait pas enregistrer, comme le "Murderer"
de Inika Mose, ou le "Zunguzunguzen"
repris par Yellow Man.
C'est à Montpellier lors de son passage avec le Sound
SOUL STEREO que nous avons eu le plaisir de le rencontrer.
Interview exclusive avec le légendaire DJ JOHN WAYNE.
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Les
gens te connaissent surtout grâce à Call
the Police, mais tu as sorti bien d'autres tunes ! Parles
nous de tes débuts. John
Wayne : Je suis un fondation DJ, un des premiers
sur la place. Ma carrière a commencé en
1979. Avant ça, j'étais déjà
DJ mais mon parcours a réellement débuté
qu'en 79. J'ai travaillé avec T.Mix en
premier, puis King Jo, King Jammy's, Killamanjaro,
Metro Media, Emperor Faith, Even,
Gemini's, beaucoup de sounds différents.
Comment
as tu choisi ton nom ? C'était une prédilection
? (Rires)
John Wayne est mon acteur préféré
! Quand j'étais jeune, j'allais voir tous ses
films ; j'étais fan ! John Wayne rétablissait
la paix sur son chemin et dans toutes les villes où
il passait. Peu importe les brigands ou les shérifs
qu'il rencontrait, aussi dangereux et destructeurs qu'ils
puissent être, rien ne lui faisait peur. Là
où John Wayne passait l'ordre suivait. Rapide
comme l'éclair, avec lui tout allait comme sur
des roulettes ! J'aime ça, rien ne lui était
impossible. Je me voyais bien avec ce nom.
En
85 tu étais avec King Jammy's,
vous avez fait un clash contre Downbeat
Sound System
Ouais
à New York ! Avec Papa San et moi même.
Je l'ai battu ! Je me souviens bien !
Peux-tu
en parler ? J'ai aussi lu que vous étiez habillés
en ninjas ...
Je
suis le premier Dj a avoir porté un costume de
ninja. Même en Jamaïque j'étais le
premier. Ce soir là en arrivant de chez nous
on avait prévu de marquer notre différence.
On débarquait juste à New York alors il
fallait marquer le coup. Voilà pour cette soirée,
mais nous nous sommes retrouvés fringués
comme des Japonais. Ca a bien marché ! C'était
bien. Jammy's a gagné, il a battu Downbeat,
soutenu par "I", John Wayne, Tonton Irie et
Shaka Demus, avec Bob Digital et Toops comme selecteurs
; par contre je me rappelle pas bien de tous les DJs
qui clashaient avec DownBeat, mais il y avait Papa San
et puis d'autres.
Combien
de temps as-tu joué avec King Jammy ?
Tu sais ça fait très longtemps qu'on travaille
ensemble. Nous avons eu le temps de produire pas mal
de morceaux depuis. Après la sortie de Call
the Police on a soufflé un peu. On a attendu
avant de lancer directement les sons sur le marché.
Il fallait s'arrêter pour presser les disques
et tout le reste.
Mais tu sais, avant King Jammy's, je poursuivais une
carrière. J'ai crée des sons pour King
Tubby's, ainsi qu'un album pour Bunny
Lee : "Eat The Tree", "Boogy
Down". Alors comme tu peux le remarquer j'ai
sorti beaucoup de chansons avant Call The Police ; mais
il est vrai que Call The Police a été
mon premier hit. J'ai aussi fait d'autres chansons pour
King Tubby's :
"Me Fake a Man Girl", "Many
Responses", "Nuff From Your Mate"
et pour le label de Junjo :
"Jalousy a killing me"
Et
tu as sorti beaucoup de morceaux pour ton propre label
?
En
effet comme "Sudden Attack" bien sûr.
J'ai produit un son avec Curany Lady. Ca a tout
déchiré : "Killing The Song Before
Me", avec le riddim Sleng Teng et un
autre son que Dawn Pen et moi avons produit.
Et c'était de la bombe ! "Original ruff
sound man ": (en chantant) "no no no
, can taste my sound and you will know ! "
De la balle.
Ouais
man ! Depuis quand existe ton label ?
Depuis 1992.
Alors
tu as enregistré d'autres artistes ?
Oui pas mal d'artistes, comme Baby Wayne, Cally
Weed, Dawn Pen, Curany Lady, je ne
peux pas les avoir tous en mémoire mais il y
en avait beaucoup.
Du
fait que ce soit ton label tu as été plus
à l'aise pour exprimer ce que tu voulais plus
tranquillement ?
Pour monter ma propre production tu veux dire ? Oui
parce qu'en Jamaïque, les producteurs sont plutôt
bon joueurs Ils font les affaires à l'amiable,
tu comprends ? Ils entretiennent bien leurs artistes
mais sans en rajouter ; je peux quand même dire
que je ne dois ma réussite à personne
d'autre qu'à moi même.
Mais de toutes façons, j'avais vraiment pris
la décision de me produire par moi même.
Aujourd'hui je voyage en France et mes chansons ont
du succès grâce aux nombreux sounds systems
et grâce au fait qu'elles sont partout sur le
marché. Ces derniers temps j'ai décidé
de presser tous mes sons. Les albums, les 45 tours,
les mettre sur CD etc En ce moment Rico et Fatta
les distribuent en France avec Soul Stereo, ils font
une bonne promotion.
Peux tu nous parler d'autres tunes que tu as composé
? "Plastical wear" , "Me No Want no
Tired Body" , pleins d'autres !
J'ai aussi sorti "Murderer", "Zunguzunguzen"
pour Yellow Man qui me l'a piraté Tu
vois je suis l'original Dj de la plupart de ces "killers"
!. Après, que les Djs continuent de toaster et
les selecteurs de mixer ! Il y en a pas mal ! Toutes
les paroles de ces chansons viennent de moi. J'en ai
écrit pour différents Djs du dancehall
mais à l'époque je n'enregistrais jamais
suffisamment de disques.
J'ai pas mal roulé ma bosse mais un jour j'ai
vu qu'il fallait passer à autre chose. J'avais
suffisamment d'expérience. J'ai voulu passer
aux choses sérieuses, passer à un différent
niveau avec Rico et Fatta, mon équipe, car comme
tu le vois je travaille en équipe : Soul Stereo
et moi même "original John Wayne" toujours
dans la place ! JE ne suis ni à Londres, ni à
Paris, je suis ici présent.
C'est la première fois qu'on
te voit en France, tu avais prévu ce voyage depuis
longtemps ?
Non, mais la musique doit transmettre des messages à
travers le monde entier. Alors si c'est la volonté
de Jah, j'irais prêcher sa parole ou que ce soit. J'accompli
mon travail quand je monte sur scène. En fin de compte,
la musique c'est aussi la vie, comme le soleil, les étoiles
et la lune. Tu sais la musique fait partie de la vie. Dieu
vit en chacun de nous, il nourrit la vie.
Le reggae aussi c'est la vie ! Dans le reggae il y a des sentiments
vrais. Quand tu ne vas pas bien le reggae est là pour
te remonter le moral. C'est un bon remède pour ce que
tu veux, c'est une thérapie.
Parle
nous de ta vie en Jamaïque .
Ma vie en Jamaïque est assez sympa. Bien qu'on raconte
pas mal de mauvaises choses sur la Jamaïque, c'est vraiment
un beau pays. Même en France, en Angleterre ou aux Etats
Unis, c'est pareil, quelques fois on dit un tas de trucs médisants,
mais en fait ce ne sont pas forcément des choses vraies.
Il y a du mauvais partout. On ne peux pas dire qu'un endroit
soit pire qu'un autre, c'est partout la même. Le ghetto
existe n'importe où. En tout cas à mes yeux
la Jamaïque est un endroit magnifique. Il y fait bon
vivre.
Quant
à l'Afrique ?
L'Afrique c'est notre terre Mère. Je voudrais tourner
dans le monde entier et en Afrique bien sûr ! Y rencontrer
mes frères et mes sisters, tout comme je vous ai rencontrés
ici, vous mes frères et surs. C'est juste un
pays différents. Je voyage dans le monde entier.
Est-ce
que le Noise Abatment Act a une grande incidence sur l'organisation
des sounds ?
Oh
non, non pas vraiment. Non la Jamaïque, c'est le pays
du reggae ! Rien ne peut arrêter le reggae en Jamaïque.
Ils peuvent essayer ailleurs mais en Jamaïque, c'est
impossible ! Il peut y avoir autant de confusions, autant
de guerres, le reggae subsiste. La seule chose qu'ils peuvent
faire, c'est suggérer, pas réaliser.
Que
penses-tu du fait que certains DJs aient été
réprimés ?
Je vois de quoi tu parles. En Jamaïque la scène
est ouverte à la jeunesse. La musique est aussi pour
eux. Tu peux même aller sur scène avec ta fille,
ton fils, tu vois. Ce sont des gamins mais en vérité
la scène leur appartient. Il faudrait que les Djs et
d'autres comprennent ça et qu'ils nettoient leurs lyrics.
Mais ce n'est pas un problème en fait, il faut juste
le faire savoir aux artistes pour qu'ils y prêtent attention,
tout en les laissant agir librement. N'oublions pas les enfants
ils viennent nous voir.
Il
y a quand même quelques toasters jamaïcains qui
sont bien ruffs, bien slack !
Ouais, juste quelques uns. Pas tant que ça. Les Djs
d'aujourd'hui en Jamaïque sont plutôt positifs.
Ils parlent de l'actualité, de la vie, des choses qui
évoluent, de la réalité en fait.
Voudrais
tu ajouter quelque chose ?
Oui plusieurs choses. Je voudrais vous dire : Gens de France
je vous aime ! Vous êtes nice, vous avez un beau pays.
Restez unis surtout. J'aime vos campagnes. J'ai remarqué
que la France est encore assez rurale, c'est une bonne chose.
En prenant le train pour venir ici (à Montpellier)
j'ai pu voir des champs de tous les côtés et
des fermes dans le paysage. C'est la richesse du pays, restez
proche de votre terre. J'encourage les cultivateurs à
persévérer, toujours.
Tu
as joué en Espagne aussi. qu'est ce que tu en as pensé
?
Ca s'est bien passé, c'était tranquille. Sinon
j'ai joué mon premier concert en Bretagne à
Lorient. Là-bas ils ont bien kiffé John Wayne
! Le public était chaud. J'ai retrouvé les vibes
de chez moi. Ils sont dans le même délire que
les jamaïcains, en tout cas ils y travaillent. Eh ! Ils
vont finir par y arriver ! C'est vrai. J'ai voulu mixer un
peu avec eux, ils ne comprennent pas tous très bien
l'anglais mais ils se débrouillent ! Ils s'adaptent
malgré tout.
Il faut savoir échanger. John Wayne communique avec
les gens ; tu comprends man, simple communication.
JOHN
WAYNE / Juman - JAHMUSIK.net - photos Juman - 10/2002