La
scène reggae anglaise est très prolifique
depuis plus de 30 ans et pourtant, en France, nous ne
connaissons que peu d'artistes britanniques.
C'est à Hambourg, en Allemagne que Dread Lion du
King Fari Sound System a rencontré un de
ces représentants pour Jahmusik.net : ERROL
BELLOT. Peut être que vous ne connaissez
pas ce nom, mais si vous êtes amateurs de reggae,
vous avez certainement déjà entendu son
titre phare, une des hymnes du reggae anglais : "Babylon"
.
Avant
ce premier enregistrement qui deviendra rapidement un
classique du reggae anglais, c'est au rythme des sounds
system et plus particulièrement des sounds clash,
très en vogue à l'époque, que Errol
commence sa carrière il a plus de 30 ans.
En fait ma carrière a
commencé au début des années 80.
J'avais des frères qui tenaient une boutique de
disque à Londres et j'y chantais souvent. Un jour
un type est venu et m'a entendu chanter. De suite il m'a
proposé de faire une compétition, un clash
avec lui. Du coup j'y suis allé avec mes breddren.
C'était à Est London et on a gagné.
C'est après ça que j'ai rejoint le label
S and G et que j'ai enregistré "Babylon"
en 1981.
En fait, même si Errol
a toujours été bercé par le son du
reggae music, le choix de s'y consacrer n'est pas venu
aussi facilement que cela. C'est sa sur qui l'influencera
le plus.
Quand j'étais jeune je me demandais à qu'elle
musique j'allais me consacrer , parce que j'aimais la
soul et le reggae. Mais ma sur écoutais Burning
Spear, elle avait un album dont je ne me rappelle plus
du nom, mais à partir de là je me suis plus
intéressé au reggae music qui était
bien plus relax que la soul. Je pense que c'est Burning
Spear qui m'a donné la vibes qui m'a amené
au Roots. Je me rappelle de cette première chanson
"Babylon", on était chez ma mère
avec ma sur et mon cousin qui était guitariste,
on l'a co-écrite tous les trois. C'était
un dimanche, ma mère était en train de cuisiner
du rice and Peas, mon cousin était en train de
jouer et on a décidé tous ensemble d'écrire
le son "Babylon". Tout a commencé là.
Si en Jamaïque les années
80 n'ont pas été les plus fructueuses pour
les chanteurs, souvent concurrencés par les DJs,
c'est bien cette voie que Errol choisit, influencé
par des voix qui le marquent encore aujourd'hui.
J'ai
toujours beaucoup aimé Errol Dunkley.
Quand j'étais tout jeune je me souviens j'avais
particulièrement aimé "Ok Fred",
number one. A cette époque il avait une boutique
de disque, j'y allais de temps en temps, chez lui aussi.
J'ai beaucoup appris de lui. J'ai aussi toujours beaucoup
aimé Dennis Brown et je continue d'ailleurs,
il m'a beaucoup influencé. Sugar Minott
a aussi été important pour moi, je l'écoutais
beaucoup. Beaucoup de chanteurs reggae m'ont influencé.
C'est donc à S and G que
le jeune Errol fait ses premières armes aux côtés
de vétérans prestigieux.
En
fait, je faisais déjà partie d'un sound
system, je chantais avant d'être dans cette boutique
et on faisait pas mal de compétition à
cette époque. Puis on avait déjà
des connexions avec Sand G records qui s 'occupait d'artistes
comme Carol Thomson, Sugar Minott, Errol
Dunkley, plein d'artistes avec qui on s'est lié,
tous des gens simples et travailleurs.
Après
'Babylon" il enchaînera de
nombreux hits sur le label S and G dont "Gimme',
'it's alright girl' ou 'Papa honey' en
combinaison avec Sugar Minott.
Ce n'était pas vraiment une combinaison ; en fait c'était
le deuxième titre que j'ai enregistré avec le
label S and G, le tune s'appelait "Gimme" et Sugar
y a posé les harmonies. Puis il a posé en DJ
sur l'autre face, le son s'appelait "Papa Honey".
C'était il y a presque 20 ans !
S and G, un véritable temple,
il y apprendra à poser sa voix, à jouer avec
des musiciens ... en bref, c'est là qu'il se formera.
A
l'époque de S and G, je travaillais beaucoup avec Carol
Thompson et on jouait souvent avec un groupe. En fait j'ai
même joué avec pas mal de groupe, mais après
la période S and G je me suis plus consacré
aux vibes Dancehall.
Mais j'ai aussi travaillé avec beaucoup de sounds,
comme le Jah Tubby's, le Unity de North London
que j'ai rejoint en 1985.... J'enregistrais pour différents
sounds.
Au
début des années 90, toujours dans la partie,
c'est au sein du prestigieux KING ORIGINAL Sound System
qu'il officie. C'est aussi au cours de cette décennie
qu'il est le plus prolifique. On le retrouve aux côtés
de Daddy Freddie, Devon, Wayne Marshall, Colourman et même
dans les Caraïbes où il effectue une tournée
aux côtés de Nerus Joseph.
Reggaeman convaincu, Errol Belott s'adapte au fil des temps
et des styles, et reste toujours attaché à un
reggae conscious, toujours spirituel.
Ce qui
fait du reggae quelque chose de spécial, c'est
l'esprit. La spiritualité qu'on y retrouve. La
musique est comme le cur ; je n'écris jamais
de chanson juste pour m'amuser. La musique c'est un
peu comme la cuisine, tu y combines différents
éléments, mais parfois tu peux y mettre
trop d'ingrédients et le goût n'est pas
bon.
Je ne suis pas un opportuniste, je me considère
comme un artiste, c'est en moi, je peux peindre, dessiner,
faire plein de choses, tu serais surpris de voir tout
ce que je peux faire de mes mains.
Au
cours des années 90, après une petite
interruption Errol travaille avec Tex Johnson pour Discotex
records et c'est à nouveau avec Nerus Joseph,
sur le label allemand Sirius Records qu'on le remarque
à la fin de la décennie.
Après plus de 30 ans de services, Errol Bellot
est un chanteur hors pair, prêt à se poser
sur n'importe quel riddim, comme l'ont fait ses idoles.
Pour lui, la Jamaïque reste la source de son inspiration
et il ne cessera d'écumer les scènes d'Europe
pour le démontrer.
On peut dire que la musique a plusieurs dimensions,
c'est comme un arbre, elle a ses racines, ses branches.
La Jamaïque est la place originale pour avoir les
vibes originelles du reggae music, ça ne fait
aucun doute. En Angleterre il y a pas mal d'artistes
jamaïcains qui depuis longtemps plantent des graines.
On ne pourra jamais dire que le reggae anglais est meilleur
parce que je pense résolument que c'est en Jamaïque
que tu trouves les vibes originales, mais nous pouvons
dire qu'en Angleterre on a une bonne idée de
ce qu'est la bonne musique.
Ensuite, tu sais, il y a beaucoup à voir avec
le marketing. Tu remarqueras que le reggae est beaucoup
plus commercial en ce moment aux états Unis,
c'est une question de marché. Les artistes vont
là où le marché est le plus prometteur.
Ca a été en Angleterre, en Amérique,
au Japon, tout est question de Marketing.
A présent
si vous souhaitez découvrir Errol Bellot, je ne saurais que
vous conseiller d'aller le voir en Sounds System avec le King Original
Sound que nous vous présenterons très bientôt.
Il devrait également sortir un album cette année sur
le label Sirius Records et vous pouvez également trouver
certaines de ses productions sur le label anglais Jah Tubby's, particulièrement
"Dont Judge" sorti récemment.
Venu jouer en France pour la première fois en 1982, Errol
attend impatiemment l'occasion de venir s'y produire à nouveau,
on espère vivement pouvoir l'accueillir cette année.
ERROL
BELLOT par Dread Lion du KING FARI SOUND pour Jahmusik 02/2003.